Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, revient aujourd’hui sur la pandémie actuelle de coronavirus et estime que l’Europe n’a pas été suffisamment préparée à une telle crise. Pour justifier ses propos elle prend l’exemple de la Corée du Sud et explique comment ce pays a su prévenir l’arrivée du virus mieux que l’Europe.

Elle aborde donc la notion de « principe de précaution », inscrit depuis 2004 dans notre Constitution, mais qui, selon elle, n’a pas suffit à nous préserver du Covid 19. Le principe de précaution « se veut être un instrument de prise de décision efficace en univers incertain […] afin de réduire des dommages qui, sinon pourraient se révéler catastrophiques », explique-t-elle, c’est-à-dire qu’ayant le principe de précaution inscrit dans notre droit nous aurions dû être beaucoup plus réactifs face à l’arrivée d’un virus dont ne connaissions presque rien.

Elle revient alors sur les récentes utilisations du principe de précaution qu’elle juge être parfois trop extrêmes, inappropriées, surévaluées voire contre productives. Elle prend alors l’exemple du bisphénol A, interdit au profit d’une autre substance moins connue et potentiellement plus dangereuse, ou de l’huile de palme, évincée elle aussi, mais dont la productivité est supérieure au colza ou au soja et la production moins avare « d’engrais, de pesticides ou de carburant par unité produite ». Elle mentionne aussi le cas des OGM en appuyant sur le concept de « risque systémique » qu’elle considère comme essentiel à prendre en compte dans l’appréhension d’un risque et dans l’application du principe de précaution.

Pourtant, reprenant l’interview dans le Point en février de Nassim Nicholas Taleb, auteur de Le Cygne noir, ainsi que le discours du biologiste Matt Ridley , Cécile Philippe réaffirme qu’il est essentiel et non irrationnel d’être paranoïaque à propos du coronavirus. Avec la mondialisation les épidémies n’ont plus de frontières et l’effet multiplicateur nous dépasse.

Pour elle, comme pour le docteur Amesh Adalja, expert en maladie infectieuse, « cette pandémie devrait servir de répétition générale ». C’est là où elle fait le comparatif avec la Corée du Sud en constatant que le pays a su gérer la crise de manière très efficace ne voulant pas répéter les erreurs commises en 2015 lors de l’épidémie du MERS qu’il n’anticipa pas assez tôt.

Passant de 900 cas recensés par jour fin février à 100 seulement début mars, la Corée du Sud semble repousser de plus en plus la propagation du virus. Comment fait-elle ? Elle a mis en place un dispositif de test à grande échelle évitant ainsi la contamination des personnes saines. En effet, la Corée du Sud a allégé les « contraintes bureaucratiques » pour que chacun puisse obtenir le test, préparé des kits de test en masse, prévu du matériel de protection en grande quantité et anticipé « la mise en place de moyens permettant de tester des gens en dehors des locaux médicaux ».

Toute ces précautions prises en amont de l’épidémie ont permis à la Corée du Sud d’avoir un taux de mortalité bien inférieur au nôtre, elle n’a d’ailleurs pas eu besoin de fermer ses frontières avec la Chine ni de confiner sa population. A l’inverse, en Europe, faute de préparation, le renforcement de plus en plus drastique des mesures nous coûtent tant « en termes de libertés individuelles » que « sur le plan économique ».

Cécile Philippe conclut donc que la richesse d’un pays ne fait pas son efficacité face à une pandémie car il faut aussi prendre en compte l’allocation optimale des moyens, renoncer à toute idéologie et ne pas négliger le risque systémique d’une telle crise.