Le principe de précaution est-il selon vous à sa juste place?
Il est souvent vécu par la communauté scientifique comme un principe castrateur.

Gravé dans le marbre suite à sa constitutionnalisation dans la charte de l’environnement en 2005, le principe de précaution est parfois perçu comme un frein à l’innovation. Inscrire un tel principe dans la Constitution n’est pas en soi problématique, cela permet au contraire de rappeler l’attachement de la France à la protection de l’environnement et de la biodiversité. En réalité, le problème tient davantage de l’interprétation qui en est faite. Plutôt que de s’en servir pour justifier un travail scientifique d’évaluation des impacts de la R&D sur la société, le principe de précaution est trop souvent utilisé pour clore définitivement tout débat autour de projets suscitant la méfiance de l’opinion publique. Une utilisation judicieuse d’un tel principe serait au contraire d’encourager les études d’impact scientifiques, qui aurait pour avantage non seulement de mesurer pleinement les conséquences de nos innovations sur l’environnement, la santé ou la société en général, mais permettrait de revigorer le statut des chercheurs en France.

Dans un rapport à paraître dans le courant de l’année 2016, Droit & Croissance recommande de renforcer l’importance des études d’impact dans le processus de création normatif. S’il est plutôt question dans ce futur rapport de l’impact économique de la législation, la logique dont doivent procéder les études d’impact scientifiques, qui devraient être au cœur du principe de précaution, est identique : mettre la rigueur scientifique au service de l’analyse des répercutions qu’ont l’innovation et les lois qui l’encadrent sur la société.

 

A suivre : 

(3/4) Le statut des chercheurs est-il selon vous correctement valorisé en France? Comment nous situons-nous par rapport à nos voisins?

(4/4) En quoi l’innovation est-elle directement corrélée à la compétitivité de notre économie et de notre modèle social? 

A propos des auteurs

Sophie Vermeille est fondatrice et Présidente de Droit et Croissance. Elle est également avocate en corporate et restructuring au sein du cabinet DLA Piper à Paris. Sophie est enfin chercheur au Laboratoire d’économie du droit de Paris 2 Panthéon – Assas, et chargée d’enseignement à HEC. Elle a publié de nombreux articles mettant en évidence les insuffisances du droit français et, en particulier, du droit des faillites. Elle a, ces dernières années, été étroitement associée par les pouvoirs publics aux discussions portant sur la réforme du droit dans ce domaine.

Mathieu Kohmann est membre de l’Institut Droit & Croissance. Il est diplômé de Sciences Po Paris après avoir effectué ses études sur le campus européen, franco-allemand de Sciences Po ainsi qu’à la Princeton University aux Etats-Unis. Actuellement, il est étudiant dans le Master droit économique de l’École de droit de Sciences Po qui lui a permis de faire une partie de ses études de droit à la Stanford Law School. Il retournera aux Etats-Unis dans le cadre d’un Master à la Harvard Law School en août 2016.

Mathieu Luinaud est membre de Droit et Croissance. Il est diplômé de Sciences Po et de l’Ecole Polytechnique (MX2013) en économie et en politiques publiques, ainsi que diplômé en droit de l’Université Paris-II Panthéon-Assas et de l’Université de Pennsylvanie.

A propos de Droit & Croissance

Créé en 2012, Droit & Croissance est un laboratoire de recherche indépendant ayant pour ambition de favoriser la croissance en France par une meilleure efficacité du droit sur le plan économique. Droit & Croissance procède du double constat que la règle de droit est un levier de croissance tandis que le cloisonnement en France entre droit et économie nuit à la qualité de la norme. Ce constat a conduit principalement un petit groupe d’avocats d’affaires à s’associer et s’entourer de jeunes chercheurs en droit et en économie pour raisonner autrement et, dans une optique d’efficacité. Droit & Croissance entend promouvoir l’analyse économique du droit, approche pluridisciplinaire consistant à étudier l’effet économique des normes juridiques, afin de proposer des réformes du droit français pérennes et efficaces. Droit & Croissance met son expertise au service des élites dirigeantes et des décideurs économiques de notre pays dans le cadre d’un dialogue constant. Les actions et l’expertise de Droit & Croissance sont désormais reconnues, à la fois au sein des pouvoirs publics et dans le milieu académique, en France comme à l’étranger, grâce à de nombreuses publications et interventions menées depuis 2012.

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