Entretien avec Xavier Le Clanche, ingénieur agronome à Paris. Il est responsable de la Charte Vergers écoresponsables de l’ANPP (Association Nationale Pommes Poires).


Au quotidien, Xavier Le Clanche pratique l’agroécologie. Comme responsable de la chartre Vergers écoresponsables de l’ANPP, il réfléchit et invente l’agriculture de demain. Son but final reste le même : imaginer une exploitation qui soit durable.


« L’agroécologie, c’est penser la culture avec son environnement.»



Oui à l’innovation. Qu’est-ce-que l’agroécologie pour un arboriculteur membre de l’Association Nationale Pommes Poires (ANPP) ?


Xavier Le Clanche.

Pour un producteur de pommes ou de poires, l’agroécologie désigne avant tout des méthodes de production. Cela se traduit par des choix sur la manière de protéger les cultures. Sur la base d’informations recueillies grâce à l’observation des vergers et par des outils de mesure et de modélisation, nous allons déterminer des seuils de risque qui vont nous permettre de prendre les bonnes décisions. On associe ainsi la technique et la technologie à l’observation et la compréhension de la nature. L’agroécologie, c’est aussi penser la culture avec son environnement, pour tirer le meilleur profit des ressources que peut nous offrir l’exploitation. En protégeant ces espaces naturels, on permet notamment à des populations d’auxiliaires de se développer. Par exemple, les haies implantées en bordure de parcelles et les bandes fleuries constituent de véritables refuges pour les espèces d’oiseaux et d’insectes. En parallèle nous cherchons à favoriser une gestion responsable des déchets, des ressources, et des sols pour évoluer dans un environnement et un écosystème sain. Dans le cadre de la démarche Vergers écoresponsables, l’agroécologie c’est enfin imaginer une exploitation qui soit durable, et anticiper dès aujourd’hui les conditions climatiques de demain pour être sûr que nos cultures se développent dans un milieu toujours favorable.

L’impact environnemental est-il moindre sur une exploitation écoresponsable ? Comment est-il mesurable ?

XLC. Au-delà de l’impact environnemental, nous mesurons surtout les bénéfices d’une telle exploitation. On sait par exemple que certaines maladies ou certains ravageurs peuvent-être régulés de manière naturelle, sans intervention humaine ou sans produits phytosanitaires. Je pense notamment au puceron lanigère dont la guêpe Aphelinus mali est le prédateur naturel. Cette dernière est une solution naturelle et durable aux ravageurs dont nous pouvons tirer de nombreux bénéfices. D’autre part, nous pouvons observer certains indicateurs comme l’abondance de la biodiversité sur nos exploitations mais aussi le rôle de l’enherbement des vergers sur la vie du sol. Tout le travail fournit sur les haies et les bandes fleuries favorise également l’apparition de polinisateurs sauvages. Ces efforts nous permettent d’avoir une action positive sur notre environnement sans avoir recours aux solutions « traditionnelles » de protection des cultures, qui présentent plus de risques.

Face aux enjeux environnementaux, comment le cahier des charges Vergers écoresponsables a-t-il évolué ? Comment travaillez-vous avec le Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL) ?

XLC. Le cahier des charges Vergers écoresponsables est né il y a plus de 25 ans, en 1997, et était au départ essentiellement basé sur la protection des cultures. L’approche de la Protection Fruitière Intégrée s’intéressait alors à produire tout en protégeant les cultures et leur environnement. Aujourd’hui le périmètre du cahier des charges écoresponsable s’est élargi. Nous sommes toujours attachés à la protection des cultures mais nous sommes aussi concernés par les problématiques de gestion des déchets, de vie des sols, de gestion de l’eau, de traçabilité, et par les questions de performance énergétique de nos installations. De manière générale, nous souhaitons entrer dans une démarche plus durable qui favorise la performance environnementale de nos exploitations. Cette évolution est pilotée par une commission technique qui est composée de producteurs membres de l’ANPP et dont le CTIFL (Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes) fait partie. Ces derniers évaluent chaque année le respect des exigences précédentes ainsi que leur applicabilité, et font des préconisations décidées par la suite en conseil d’administration. Cet échange entre l’expérimentation et la réalité des vergers contribue fortement à faire évoluer le cahier des charges.