3 questions à Flavien Neuvy,

Économiste spécialiste des questions de consommation,
d’industrie et d’automobile

Sans titre

Émergence de nouvelles mobilités, hausse du prix du carburant et baisse de la limitation de vitesse à 80 km/h : est-ce la fin de la voiture ? Pas si sûr. La voiture reste et restera pour les années à venir le mode de déplacement plébiscité par les Français. D’où l’intérêt de la penser électrique et connectée. Quel visage aura vraiment la voiture demain ? Décryptage de Flavien Neuvy, économiste et membre du groupe de travail et de recherche Oui à l’innovation !

On entend de plus en plus parler de la voiture électrique, surtout avec la récente hausse du prix du carburant. Peut-on imaginer un jour un parc automobile 100% électrique ?

On ne pourra pas tous rouler à l’électrique. D’une part, parce que rien ne dit que nous ayons sur la planète les ressources nécessaires au fonctionnement du milliard de voitures actuellement en circulation. D’autre part, parce que tant de voitures électriques impliquerait de produire de l’électricité supplémentaire alors que beaucoup de pays sont très peu électrifiés.

Mais il est vrai que l’électrique fait beaucoup parler. Il était au cœur de toutes les discussions lors du Mondial de l’Auto 2018.

Si la voiture électrique est sans cesse mentionnée, on ne constate pas pour autant une augmentation significative de la demande. Les voitures électriques ne représentent qu’un peu plus de 1% des ventes de voitures neuves. Actuellement, les voitures les plus demandées sont les SUV et les 4X4 Crossover : elles consomment plus et qui coûtent plus cher. Ce n’est pas forcément très rationnel me direz-vous, surtout quand on voit l’augmentation du prix du carburant et la prise de conscience face aux enjeux environnementaux. En fait, cela signifie simplement que lorsque les automobilistes achètent une « voiture » la dimension « plaisir » est un critère important.

Néanmoins, il est vrai que l’hybridation des voitures va très fortement se développer. À l’avenir, toutes les voitures seront électrifiées.

Dans le domaine de la mobilité, en particulier dans le secteur de l’automobile, quel type d’innovation domine ?

Dans le domaine de la mobilité, mais c’est le cas dans beaucoup de secteurs d’activité, c’est sans conteste l’innovation de rupture qui domine.

Quand une innovation de rupture émerge, les acteurs historiques du secteur sont au départ souvent sceptiques. Prenons l’exemple du secteur aérien. À l’origine, les compagnies aériennes historiques ne croyaient pas à la réussite du low-cost. Finalement, ce dernier s’est imposé. Dans le secteur de l’automobile, on peut citer Tesla qui est arrivé avec son modèle 100% électrique, ou Google avec sa Google Car pour la voiture autonome. Mais dans l’automobile, on constate depuis quelques années déjà que les constructeurs français ne veulent plus rester spectateurs. Ils anticipent davantage. Par exemple, sur l’autopartage, les constructeurs français prennent des initiatives.

À quoi ressemblera la mobilité de demain ? La voiture tiendra-t-elle encore une telle place dans nos déplacements ?

On constate un recul de la voiture dans les grandes métropoles, en particulier Paris. D’autres modes de transports sont privilégiés : trottinettes électriques, vélos électriques, free floating, transports en commun… Mais il est difficile d’imaginer un monde sans voiture. D’ailleurs, selon L’Observatoire Cetelem, moins de 20% des Français imaginent pouvoir se passer complètement d’une voiture. Une grande partie des Français n’ont pas le choix : pour aller travailler, il leur faut une voiture. Et cette absence de choix est encore prégnante à mesure que l’on s’éloigne des centres urbains. Si 32 % des ménages des grandes villes disent ne pas avoir d’autre choix que la voiture pour se déplacer au quotidien, ce chiffre monte à 83 % dans les communes rurales isolées (Observatoire des mobilités).  .

Indéniablement, donc, la voiture fait bel et bien partie de l’avenir de la mobilité. Surtout que la voiture de demain va gagner en autonomie. On ne passera évidemment pas du « zéro autonomie » au « 100% autonome ». Tout se fera progressivement. Par exemple au début, on pourra lâcher le volant dans certaines situations. La voiture autonome est une révolution majeure dont nous n’avons pas encore vraiment conscience. Dans la voiture 100 % autonome, il suffira de s’installer à l’intérieur, de dire « Je suis là et je veux aller là » et elle vous y emmènera. Ce n’est pas pour maintenant mais on l’aura un jour.

Dans le domaine de la mobilité, l’innovation ne cesse jamais. De nouveaux concepts et de nouvelles technologies apparaissent chaque jour. L’avenir de la mobilité c’est la cohabitation des différentes mobilités. Dans le futur, la mobilité sera diverse et diversifiée.